LA RENTREE LITTERAIRE
La rentrée littéraire bat son plein et Octobre viendra encombrer les bibliothèques et les tiroirs de feuilles mortes à peine lues ; La plupart des histoires, posées sur les étagères ou enfermées dans les commodes, ne renaitront pas d’avoir fanées si vite ; Ces milliers de mots sans lecteur sont comme des morts qu’un vent froid d’hiver glace sur le papier vélin ; Qui viendra les réveiller de leur sommeil éternel ? quelle main caressante saisira , à nouveau , la couverture d’un livre abandonné au temps , pour déflorer les pages si longtemps refermées ? Quels yeux amoureux jouiront des lignes courbes que tracent ces écrits sur les feuillets endormis …Quel explorateur ira à l’assaut de ces montagnes de mots qui peuplent nos greniers et nos caves ?
Il faudrait, comme dans ce grand mouvement politico-philosophique nommé « développement durable » , que les livres , déjà « de seconde main » à peine nés , soient recyclés
On imagine bien les boutiques vintage du Printemps ou du Bon marché , se faire l’écho du recyclage vertueux des milliers de livres abandonnés et faire l’apologie , d’une allocution , d’un épitre , d’un apophtegme , d’un billet , d’un concetto pour attirer le chaland moderne toujours à la quête d’une bonne affaire écolo ; On reverrait ,sur les étals, les auteurs vites oubliés d’un premier roman réussi ou d’une saga historique , On redécouvrirait avec bonheur la prose de tel ou tel qui furent nos compagnons de route le temps d’un été , d’une veillée au coin du feu ou de longs mois d’hôpital ;
Du coup, les conciliabules éphémères d’un livre, dans ce recyclage vivifiant, deviendraient éternels et on se transmettrait de génération en génération, comme un trésor familial, les bons mots d’un bouquin jamais oublié …comme on se recite une fable de Lafontaine ou une stance du Cid ; Nous deviendrions des cultivateurs de mots, ensemençant la mémoire individuelle et collective, passeurs d’histoires et de racontars piochés dans des livres toujours présents. Nous pourrions offrir à la littérature un port tranquille où les bateaux-livres se balanceraient délicatement sur les eaux paisibles, assurés d’un avenir serein, plutôt que ce maelstrom qui emporte tout , ce gargantua qui avale les feuillets sans distinction pour n’en rien recracher , plongeant aux oubliettes les milliers de verbe polis par des écrivains poètes.
Septembre et sa rentrée littéraire n’aurait alors plus ce petit air triste des fêtes où le buffet surabondant précède la disette hivernale ;
Mais Il faut faire Vite pour sauver ces livres oubliés car le temps presse ; Un chatgpt veille en embuscade pour réduire à rien la création littéraire, appauvrir le vocabulaire à 500 mots tous égaux, tous pareils et produire des livres d’un seul format au contenu stéréotypé ;
Il y a urgence à sauver la littérature créative, que la rentrée matérialise, en lui offrant un sanctuaire accessible à tous : des boutiques de seconde main ou d’habiles vendeurs vous guideraient avec assurance au chevet d’un roman, d’une nouvelle , d’une belle histoire : Il ne faut pas oublier que certains verbes se meurent de n’être plus lus et quand ils disparaissent, la barbarie s’empresse de prendre le dessus ! Sauvons les mots oubliés
C'est aussi la rentrée d'Eric Bouron