Dans les années 90 du siècle précédent, l’Espagne poussée par l’Europe et ses subventions, lançait son premier programme éolien en Andalousie où toutes les collines possédaient un vieux moulin d’autrefois que Cervantes avait popularisé dans le monde entier avec son best-seller: « Don Quichotte de la Mancha » publié en 1605. Les ailes des moulins poussées par les vents andalous broyaient le blé pour en faire de la farine… Ces moulins-là équipées de vergues de bois et d’ailes en toile appartenaient à nos paysages familiers sans qu’il y ait quoi que ce soit à redire… Ils faisaient partie intégrante de nos traditions et de notre art de vivre. Le peu qu’il en reste aujourd’hui a été reconverti en résidence secondaire ou en office de tourisme. Comme dit ma voisine qui aime toujours le Formica, il faut vivre avec son temps… Issu d’une famille de meuniers dans l’ile de Noirmoutier depuis le XVIIIe siècle, j’ai toujours aimé ces moulins de pierre qui bordaient, à la pointe du Devin, la côte la plus ventée et la moins protégée. Ils avaient fière allure et ne constituaient pas des verrues dans le paysage quotidien des jours de labeur et de tranquillité. Leurs ailes dictaient même parfois des messages alentour en fonction de leur positionnement au moment des batailles en mer ou sur terre. Les portables n’existaient pas… Pour en revenir à l’Espagne, et à ses éoliennes qui ont remplacé ses moulins aux ailes carrées, elles sont passées en trente ans d’une petite centaine à plus de trente mille aujourd’hui! Il faut dire que les vents soufflent beaucoup dans le sud de notre chère voisine si merveilleusement ensoleillée.
La France, elle a pris son temps, et les premières éoliennes ne sont apparues qu’en 2000, poussées par une mode écologique qui voulait marquer les esprits et les portefeuilles.
Accusant du retard, notre pays a multiplié ces dernières années les programmes en tous genres pour bâtir un parc éolien digne de sa réputation de leader incontesté du nucléaire et de l’électricité la moins chère du monde!
Dernier en date, le parc éolien de la baie de La Baule composé d’une centaine de machines gigantesques qui barre désormais l’horizon et qui empêche d’apercevoir ce fameux rayon vert, défini par Julien Gracq, l’écrivain des bords de Loire, comme le « point suprême d’une journée d’embellie »… Je n’avais rien contre les éoliennes sans doute nécessaires à la quête des économies d’énergie mais là, on pousse le bouchon, un peu loin.
Quand la Baule-les-Pins deviendra La Baule-les-Eoliens qu’aura t’on gagné? C’est toute la question.
De Pornichet à la pointe de Penchâteau, on aperçoit désormais la minuscule ile des Evens, si emblématique et si belle, environnée par des tonnes d’acier plongées dans la mer, immobiles et guerrières. Comme des statues inquiétantes qui veillent au loin… L’éolien est bien quand il ne défigure pas le paysage. Ici et là et en petite quantité.
Là, à La Baule, l’éolien made in USA est devenu suffocant et pour tout dire effrayant!
Aucune logique économique d’aucune sorte ne pourra justifier ce crime de lèse-beauté qui blesse les coeurs pour longtemps…si l’on songe au mot merveilleux de l’écrivain Jean Yole qui pensait que c’était dans le coeur des hommes que s’achevaient les paysages!
Il ne savait pas, heureux homme, qu’ils pourraient aussi mourir un jour…
Une énergie dans le vent